On la connaît tous. C'est la fameuse "Banque d'en face".
Ces jubilatoires petites scénettes (jamais compris pourquoi il fallait écrire « saynète ») moquent la crétinerie, la nullité, la bêtise, l’absence de compétences crasses des conseillers de la banque d’en face… du CIC.
Pourquoi cette saga détruit-elle l'image des banques en France alors ?
D’abord parce qu’elle est excellente. Casting génial. Drôlerie. Vérité vécue.
Ensuite parce qu’elle dure depuis quinze ans. Quinze ans ! Donc on finit par avoir à peu près compris la tension dramatique et le schéma narratif.
Enfin et surtout parce qu’à montrer la banque d’en face, elle met finalement en scène la réalité de la banque de détail française. De toutes les banques.
C’est à dire : Des marques faibles. Une absence d’image bien définie et différenciée. Des offres très similaires. Une « expérience client » toujours à peu près équivalente. Selon la chance ou l’infortune, son conseiller clientèle est soit sympathique et compétent. Soit le contraire. Des communications épouvantables. Soit nationales et wishfullthinking-esques. Soit terrain et alors là on tangente le pathétique
Le paradoxe c’est donc qu’à force de se moquer de l’autre, le CIC nous expose la réalité de la catégorie.
Qui n’a évolué en rien, dans ses process, sa culture, ses modes de formation, ses outils, son marketing, son branding depuis « Votre argent m’intéresse » (1973)...
Et pendant ce temps sont arrivés quelques petites marques du type Amazon ou Apple et ont émergé des tueurs de la qualité de l’expérience client articulée sur le couple offre + conseil (Decathlon en particulier, mais aussi Picard ou Uniqlo).
Voilà voilà. Pendant ce temps, à la banque d’en face, on est toujours en 1996, les erreurs de la banque ne sont jamais en votre faveur (formidable film de Muntz & Bitton 2009) et on n’y aime pas les millennials.
C’est terrible. Bien faire publicitairement aboutit à une sorte de suicide collectif de la profession. Une sorte de secte de l’Ordre du Temple Solaire où chacun boirait tous les jours avant d’aller « en clientèle » un grand verre de curare au Lexomil™.
Peut être qu’on est arrivé à un tournant désormais, pour cette catégorie et sans doute pour beaucoup d’autres, dans la façon de revendique et « d’engager » comme on dit de nos jours.
Investir tout son budget de communication dans la formation ?
Aller voir comment fonctionne First Direct en UK (euh… rapidement) : 3ème marque pour la satisfaction client en UK ! Derrière Amazon (peut pas lutter là) et Utility Warehouse, un prestataire de services aux particuliers (du gaz de ville à l’accès internet).
Oui. C’est peut être l’exemple de Utility Warehouse qui nous donne la solution.
La communication publicitaire est écrasée entre l’imposition de marques aux modèles économiques réinventés.
Avec de nouveaux acteurs dont la prestation est au top (et qui ne communiquent pas ou presque).
Et l’exploration de nouveaux axes via des initiatives plus ou moins utiles à mi-chemin entre la RSE, l’innovation et le digital. Tous les Lions de Cannes cette année le démontrent.
En 2012, la ravissante Hope Bagozzi de McDo Canada nous expliquait pourquoi il était nécessaire de "tricher" en prenant en photo les burgers. Voir le billet là.
De la même manière que les bouteilles de Coca avec les prénoms dessus, cette initiative d'abord locale ayant démontré son efficacité, elle est réutilisée ailleurs.
McDo USA a repris l'affaire avec une grande campagne YouTubée pour nous expliquer ce qu'il y a réellement dans les produits McDo. Et ainsi dissiper les ombres et les légendes urbaines à propos d'oeils de boeuf dans la viande des burgers, de sauces anti-vomissement ou de têtes de poussins dans les nuggets.
Le choix du porte-parole, sorte de Pierre Bellemare américain pour aller poser des questions, visiter les usines et infirmer ainsi toutes ces rumeurs et ces malentendus, c'est Grant Imahara. Un spécialiste du modélisme et des télécommandes nous apprend Wikipedia. Connu du grand public non pour ses maquettes de Starwars mais pour sa participation à l'émission Mythbusters dont le propos est justement de répondre à des questions qu'on se pose tous.
Comme "comment se forment les embouteillages ?" ou "peut-on jouer au tennis sur les ailes d'un Piper Cup en vol ?".
Le mec a une super bonne tête. Il se balade en voiture, filmé comme le type de Nescafé qui vient vérifier si ses amis Facebook sont vraiment ses amis dans la vie (question à Mythbusters : est-ce que Grant et Arnaud se connaissent dans la vie ?) et il va dans les usines pour poser des questions et vérifier la bonne foi de McDo.
L'épisode du boeuf ("est-ce qu'il n'y a que du boeuf dans les steaks hachés de McDo ?") a lieu chez Cargill.
Cargill, c'est un mastodonte de l'alimentaire aux USA. C'est la PLUS GROSSE ENTREPRISE PRIVEE aux USA.
C'est les 3/4 des revenus d'Apple... Lire à ce sujet le passionnant Foodopoly dont la thèse est que les industriels ont pris la main sur l'alimentaire au détriment des agriculteurs.
L'épisode sur les oeufs chez McDo (quand ils se passent les oeufs) commence au tapis de lavage et pas au poulailler (lien vers la chaine YouTube).
Et celui des frites commence avec un paperboard pour nous indiquer qu'il y a 19 ingrédients dans les frites McDo. Mais c'est pour notre bien à tous. C'est pour qu'elles soient bonnes, belles, constantes en qualité et en goût. Ce qui est vrai et légitime d'ailleurs.
Qu'est-ce qu'on peut en retenir ?
Il y a d'abord ce grand mouvement de transparence qui secoue les entreprises. C'est inéluctable et irrémédiable.
Ensuite, ici, McDo est remarquablement intelligent.
En arrivant à ne pas tout révéler mais en donnant accès aux process et aux coulisses, hier inaccessibles.
Dans sa façon de caster, produire et marketer son propos : Grant Imahara est sympathique et crédible (malgré un nom qui associe un blend et un single malt, ce qui est bizarre).
En parvenant, dans ce grand mouvement "inboundien", à nous faire accepter implicitement que c'est normal de faire comme ça parce que sinon on ne pourra pas arriver au résultat auquel on est habitué et qu'on attend.
C'est très dualiste comme pensée. Soit on met 19 ingrédients dans les frites et c'est des super frites McDo soit ya pas de frites McDo.
Donc si on ne mettait pas de Dimethylpolysiloxane (du silicone) dans les frites, vous ne seriez pas contents.
Et c'est vrai.
On n'en est qu'au début. Voyons comment les Danone, Nestlé, L'Oréal, Coca Cola mais aussi Carrefour et Auchan et McCain etc. vont faire dans le futur face à ce défi de la "publicness"
Sur ce, je dois aller partager un Coca avec deux copines.
1. Etre arrivé à générer au préalable des contre-propositions des concurrents (Samsung, LG) avant même d'avoir révélé développer ni même montré sa propre montre, c'est très fort.
2. Vit-on jamais en aucun temps, en aucun pays plus magnifique explosion de moyens pour expliquer et montrer un produit ?
Je ne crois pas.
Il ne faut pas rester sur le petit film de la keynote (OK… "Le" keynote). Il faut regarder les dix minutes de démo avec en voix off Jony Ive qui déclame une sorte de mode d'emploi – manifeste de l'Apple Watch.
Dans vingt ans, je parie que cette vidéo sera montrée à Venise dans un musée de François Pinault.
La rédaction. Rôôôôôôô. Le montage ! Le montage ! La musique…
Et la douce voix de notre bon Jony qui susurre des phrases comme :
- The simple leather classic buckle references traditional watch vocabulary.
"Traditional watch vocabulary"… J'imagine les interminables discussions sur le projet devant un verre de Dalla Valle 2002 avec Angela Ahrendts dans son manoir avec vue sur Alcatraz. Oui, la maison de Jony Ive donne sur Alcatraz. Ah ben ça alors.
- We have worked closely with horological experts from around the world to help us understand the cultural and historical significance of time-keeping. And this has profoundly informed our design.
J'imagine les "horological experts", enlevés dans leurs ateliers suisses, la tête recouverte d'un sac en feutrine noire, emmenés dans un avion privé pour Cupertino où l'on les interroge sur la "cultural and historical significance of time-keeping" avant de les faire hypnotiser par un mentalist afin de tout oublier et de de les réexpédier à Schaffhausen par le même Falcon 7X.
3. C'est l'éloge de la servitude volontaire. La tyrannie des objets.
Lafontaine vivrait encore, il réécrirait le Loup et le chien version celui qui a une montre Apple et celui qui n'en veut pas. Et Guy Debord se resservirait un demi devant un tel désespoir.
4. Le produit sert-il à quelque-chose ?
Non. Et oui.
En fait la question n'est pas là. Je crois qu'on rira dans quelques années quand la V4 ou V5 de l'Apple Watch sera sortie.
Celle-ci est grosse, épaisse, pas très belle, pas étanche, avec une autonomie ridicule, inutile sans son iPhone à proximité.
Mais le "quantified self", l'hyperconnexion, l'autonomisation vis à vis du device référent qu'est le mobile à l'heure actuelle, ça va nous tomber dessus aussi sûrement que… la pomme de Newton.
C'est un changement de plateforme. De paradigme. On se trouvera ridicule d'avoir trimballé pendant des années ces téléphones mobiles dans nos poches.
Ça va prendre du temps. Ce sera la réussite d'Apple ou d'autres. Ou de plusieurs et après des débuts difficiles, mais c'est sûr qu'on y va.
Le paradoxe est d'ailleurs que la jeune génération ne porte plus de montres.
You know it's driving Apple, from the beginning. This, compulsion, to take incredibly powerful technology, and make it accessible, relevant, and, ultimately personal. We’ve designed, a range of products so personal, you don’t put them on your desk or in your pocket—you wear them, on your wrist. We conceived, designed and developed Apple Watch, as a completely singular product. You know you can’t determine a boundary, between the physical object and the software.
We’re introducing, an unparalleled level of technical innovation, combined, with a design, that connects with the wearer, at an intimate level to both - embrace individuality - and inspire desire.
The watch senses, that you’re raising your wrist, and then activates the display. You see, an organization of apps, that while new, is somehow familiar. Navigation, is fluid, and vital. Magnifying content, on a small display, is fundamentally important. So we’ve developed, a whole new interface - specific to the challenges associated, with a product this small.
The digital crown, is a remarkable input device. It fluidly zooms into apps. It enables, nimble, precise adjustment. And critically, you can use it, without obstructing the display. It’s also the home button.
Apps are designed, for light-weight interaction. Smart replies and dictation, let you respond quickly to messages. Glances, let you swipe through information efficiently. And pressing the button below the digital crown, instantly shows you friends, you can contact in just seconds. And with digital touch - we’ve developed an entirely new way, for you to connect intimately with others. You can get someone’s attention, with a gentle tap. Or you can send huh quick sketch. Or you can even share - something as personal as your own heartbeat.
These are… subtle ways to communicate, that technology, often inhibits, rather than enables.
These apps, all take advantage, of the flexible retina display. It’s been laminated to a machined and polished, single crystal of sapphire. That’s the second hardest transparent material, after diamond.
In addition to the digital crown, we’ve had to invent other input technologies designed specifically, for a product this small. So as well as sensing touch, the display also senses force —quite literally - adding a new dimension to the user interface. Tiny electrodes, around the display, recognize the difference between a tap - and a press. This provides, instant access to a whole range of contextually specific controls.
For the first time, and - with great intention, we’ve designed, not only what you see, but also what you hear and feel.
We’ve developed, a linear actuator, to provide “taptic” feedback, to complement your interactions. This “taptic engine”, combined with the audio feedback from our water-resistant speaker, creates a discreet and nuanced experienced.
At the heart of the watch, is a custom-designed chip, that integrates many subsystems into one remarkably compact module. Which is then completely encapsulated, to protect the electronics. It’s essentially, miniaturizing a entire computer system onto a single chip.
The zirconia back, has four, sapphire lenses. Infrared and visible light LEDs, along with photo sensors, detect your pulse rate. Using its gyroscope and accelerometer and the GPS and Wifi from your iPhone, the Watch provides a comprehensive picture, of your daily activity. This allows it, to establish and suggests goals. And reward fitness milestones.
The back crystal, also houses a unique charging solution that combines our MagSafe technology with inductive charging. Completely sealed, it requires no alignment or exposed contacts.
Apple Watch is, incredibly accurate. It uses, multiple technologies, keeping time to plus or minus 50 milli-seconds. We have worked closely, with horological experts, from - around the world, to help us understand, the cultural and historical significance of time-keeping. And this has profoundly informed our design.
We know, that wearing something all day, every day, becomes, as much about personal preference and self-expression as functionality. So we’ve designed a range of watch faces. You can personalize, both their appearance, and their capability.
Personalization, extends way beyond the interface. We have designed, six different straps, and a mechanism, that makes the straps easily interchangeable - with a refinement and precision that’s born of functionality.
The sport band, in a range of bold colors, is made from a tough, durable, sweat-and chemical resistant high-performance elastima.
The leather loop, comes in a soft, quilted leather, that conceals magnets for fastening and adjustment. We’ve used traditional leather, but in a new sports context that’s, designed for optimum comfort.
The supple, hand-crafted leather modern buckle, closes, with a solid metal clasp, that wraps symmetrically around the wrist.
The simple leather classic buckle, references traditional watch vocabulary. And the stainless steel link bracelet, has a slim - deployment clasp, that is contained within a 2.6 mm band.
The Milanese loop, is crafted, from a fluid, flexible, stainless-steel mesh, with a magnetic closure, that has an elegant simplicity and is infinitely adjustable.
And of course, we knew, one size wouldn’t fit everyone, so we’ve also developed a smaller watch with matching smaller straps.
From different cases and straps, we’ve actually created three distinct collections.
The first, Apple Watch, features a polished case made from a custom alloy, of stainless steel.
The sport collection has an ion-exchanged cover glass, and a anodized aluminum case, that is 60 percent stronger, than standard alloys, and yet it’s incredibly light and durable.
Apple Watch Edition, is made from 18-karat gold, that our metallurgists have developed to be up to twice as hard as standard gold.
Creating, beautiful objects, that are, as simple, and pure, as they are functional—well, that’s always been our goal at Apple. We designed Apple Watch as a whole range of products, enabling millions of unique designs. Unparalleled personalization both in appearance and capability.
I think now, we’re now at a compelling beginning. Actually designing technology, to be worn—to be truly personal.
On connaît tous l'histoire. En 2001, Marks & Spencer en difficulté financière quitte la France.
Des hordes de harpies s'arrachent les derniers bocaux de poivrons marinés dans le magasin du boulevard Haussmann.
Ensuite plus rien. Pendant dix ans.
Seule solution, faire un détour après une réunion à Londres pour aller faire des provisions à Covent Garden de Thé du Kenya Extra strong ou de beans à la sauce tomate.
Dix ans plus tard, c'est le grand retour. D'abord aux Champs Elysées avec un corner alimentaire assez petit. Et puis… et puis. So Ouest, Aéroville, Beaugrenelle, etc. Et puis des Simply Food dans les rues ou dans les grands centres de passage comme les gares RER.
Ça y est. On va pouvoir voir de quoi ils sont capables en matière de marketing les Anglais.
C'est pas compliqué : c'est quasi-parfait. Génie du packaging, de l'identité, du naming, de la rédaction, de la structuration des gammes. De "l'homogénéité dans la différence" pour plagier je ne sais plus qui.
On lit beaucoup que dans ce métier, il faut avoir le sens du détail. Mais là le détail est tellement poussé qu'on se demande ce qu'il va pouvoir être possible de faire après. C'est la fin du marketing peut être. En tout cas d'un certain marketing.
Le lait, c'est pas du lait. C'est du lait des iles Anglo-normandes…
On ne dit pas "allégé" mais Count On Us au sein de la gamme Fuller Longer.
Ce sont des gens qui investissent dans l'extrême qualité des photos, qui agrègent et hybrident avec talent le modèle alimentaire britannique et des modèles étrangers. Pas que le Chicken Korma parce que Jamie Oliver est passé par là depuis et que l'Angleterre est un désormais un endroit où l'on s'intéresse à tout ce l'étranger produit de mieux en alimentaire.
Alors, le niveau de qualité objective n'est pas toujours au rendez-vous. Je veux dire que le 2nd moment of truth est parfois un peu déceptif après le 1er en magasin. Les produits sont bons. Certains excellents. D'autres tout simplement très bof.
Ce qui me frappe, c'est que le contrat est clair. De la qualité, simply priced mais bien chère quand même, des DLC courte, un ton de voix très reconnaissable et toujours sur le principe de l'intelligence.
Ce modèle n'est pas universel. On ne va pas se convertir au modèle alimentaire britannique au quotidien. Ce ne sera jamais "une niche qui arrose tout le monde" comme avait dit quelqu'un il y a longtemps.
En tout cas, il permet de réévaluer nos standards. Comme si Tesco ou Waitrose débarquaient dans nos centre-villes.
Oui, je crois qu'au delà du niveau de prix – élevé – Marks & Spencer valorise l'image que les clients se font d'eux mêmes.
Parce qu'on n'achète pas des produits ou des services dans la vie. On achète une meilleure version de soi-même.
On y découvre que Jeff Bezos semble avoir la sensibilité d'une clé USB et l'empathie d'une prise RJ45.
Assister à la disparition des journaux papier et des grands noms historiques (Newsweek…) n'est pas a priori son problème et ce n'est pas en rachetant le WP que cela va changer grand chose à l'économie générale du secteur.
Ce n'est pas l'appel des terres natales.
Il n'a pas grandi à Washington. Il a grandi au Texas et en Floride, étudié l'ingénierie à Princeton (New Jersey) et a fondé amazon.com à Seattle, état de Washington…! Mais pas DC. Celui en haut à gauche sur la carte).
Ce n'est pas parce qu'il a beaucoup d'argent et qu'il aurait envie d'un jouet.
A priori non.
Il a son avion et son hélico déjà.
Il est passionné par la conquête spatiale et finance sur ses sous persos un programme de développement de vols spatiaux habités (Blue Origin ça s'appelle) pour lequel il a acheté des milliers d'hectares au Texas afin de faire des essais de réacteurs qui incommodent d'ailleurs la population parce que ça pique les yeux.
Et il a financé un projet d'horloge sensée durer 10.000 ans (The clock of the long now).
Ce n'est pas parce qu'il est stupide. Parce qu'il est sacrément malin.
Mais alors pourquoi racheter pour 250 millions de $ un journal qui a connu ses grandes heures mais qui est aujourd'hui en voie de déclin quasi-irrémédiable ?
Je vous propose une hypothèse perso ("hypothèse" = "sous la thèse").
C'est qu'il va / veut siphonner l'expertise éditoriale accumulée pendant des décennies par les journalistes, rédacteurs et autres correcteurs du Washington Post pour gagner la grande bataille de l'éditorialisation des contenus sur internet.
Je pense qu'il a identifié la grosse faille de tous les producteurs ou agrégateurs de contenu sur internet.
Il y a trop d'informations. "Infobésité" qu'on dit désormais. Elles sont mal organisées ces informations. Elles sont mal sourcées. Elles sont mal éditées. Elles sont difficiles à consommer, indigestes, fouillis, brouillon.
Tapez "musique" sur le moteur de recherche du site sfr.fr : 2890 résultats. Sur sfr.fr ! Pas sur google via sfr.
2890 !
Autant dire : passez votre chemin. Rien à exploiter là-dedans à moins d'être un névropathe.
Il (Jeff) veut sans doute aspirer le savoir-faire des mecs du WP pour en faire un groupe pilote dans son groupe (a "two pizzas team" qu'il appelle cela) qui va améliorer l'organisation des masses d'informations produites par les entreprises (éditeurs de livres ou fabricants de GPS), par les internautes (les reviews) et par les professionnels de la profession type journalistes spécialisés, critiques, etc.
Pour rendre le contenu d'amazon.com plus simple, plus lisible, plus attractif.
Pour en faire des "stories" comme disent les Américains.
En faisant cela, il va prendre un temps d'avance supplémentaire sur ses concurrents. En premier lieu, Apple qui est nul en la matière.
Oui, s'il y a bien un domaine dans lequel Apple est nul, c'est dans l'éditorialisation des contenus.
Sur l'Apple TV, sur l'iTunes Store, l'App Store, le contenu du site apple.fr, les pages d'aide, les tutorials : tout ce que produit ou agrège comme informations Apple est très médiocrement voire dans la plupart des cas, carrément nullissimement organisé.
Et comme il a acheté le Washington Post sur ses propres sous personnels, il brouille les pistes en faisant croire (possibly) que c'est un projet perso.
Bon. Aucune garantie de rien. Juste une hypothèse comme aurait pu chanter Jackie Quartz il y a trente ans.
Des centres commerciaux, il y
en avait déjà en France, mais le nombre d'ouvertures récentes tend à faire penser
qu'on en manquait.
Etant allé visiter les trois
derniers dans et autour de Paris, je me pose cette question à mille milliards
d'euros : qu'est-ce qui fait que ça marche ou pas ?
Le premier élément de réponse
est que ce ne sont certainement pas les campagnes de pub : toutes plus
tragiques les unes que les autres, du "shopping 5 étoiles" au
très GérarddeVilliersien dos dénudé de cette jeune femme, habitante du Front de
Seine, tour Perspective 2, appartement 2304, qui nous fait frissonner derrière
le cul de bus.
Non.
Le concept ?
Quel concept ? C'est quoi le
"concept" ?
Un mélange d'emplacement, de
taille, de fonctionnalités, de sélection d'enseignes dont celles que l'on
pourrait appeler les "anchors" (celles qui aspirent le chaland) comme
un hyper (Leclerc à So Ouest, Auchan à Aéroville, et un… Monoprix à Beaugrenelle).
Les marques exclusives ?
Mais c'est impossible de tout
avoir. Il faut choisir.
A moi Hema, à toi Guerlain.
A moi M&S, à toi aussi
M&S. Et à moi aussi !
A toi SuperDry (super nom), à
moi Hollister.
A toi Bose, à moi Bose aussi.
Bon.
Mais je ne vais pas aller
là-bas pour une seule enseigne.
Les services annexes ?
Un très beau food court /
mall chez Aéroville (génial nom Aéroville. Logo pas terrible) mais où il faut faire
une heure de queue pour manger des vongole
chez Fratellini (celle du cirque ?!!) alors qu'il n'y a personne chez Prêt
à Manger. Mais non.
Un endroit qui a
"l'audace de réinventer le goût" chez So Ouest avec Dalloyau ?
Un Noura et le grand retour
du Bermuda Onion, un marqueur mémoriel du XVème arrondissement, un amour des
gestes et des savoir-faire chez Beaugrenelle ?
Alors quoi ?
D'abord constatons que
l'inventivité semble être surtout mise au service de la sélection des
enseignes. Aller trouver et signer ce qui est tendance, ni trop, ni trop peu.
Pas trop niche. Pas trop mass non plus.
Que la fonctionnalité, les
circulations, le repérage, cela reste encore quelque chose de bizarrement pas
au top.
Pas de wifi. Enfin je veux
dire que je n'ai pas réussi à me connecter en wifi avec mon téléphone. Jamais.
Chez aucun des trois.
Pas de 3G non plus.
On peut passer des appels
cela dit. C'est pas comme au Salon du Bourget.
Pas de parking 2 roues devant
Beaugrenelle et des hordes de contractuelles névrosées alignant les scooters
comme à la bataille d'Eylau.
On se frotte les yeux. On se
gare sur le parvis devant les jonquilles où ça ne gêne personne et on se fait
aligner. Mais c'est du suicide commercial. Enfin.
Je n'ai pas trouvé les places
2 roues à Aéroville. En revanche j'ai trouvé le sol peint à la laque
glycérophtalique qui te fera remplacer ton rétroviseur si tes pneus sont
mouillés du dehors.
On semble rester sur ce
paradigme du concept, de la sélection, du cocktail, avec une dose d'identité
qui se tient à la bonne distance de celle des enseignes.
On tente le geste
architectural mais sans aller trop loin. Une trémie immense à Beaugrenelle qui
permet de ne pas voir les magasins en dessous, qu'on ne pourra d'ailleurs pas atteindre car
on ignore où vous dirigent les escalators.
Un labyrinthe chez So Ouest.
Un circuit en forme de
je-ne-sais-pas chez Aéroville avec du personnel en tenue de personnel de vol
façon Catch me if you can.
Oui, on étire sur le concept,
comme de la guimauve.
On n'invente rien de
réellement nouveau.
Avec le paradigme que dans
"centre commercial", il y a centre et il y a commercial.
On pense transaction et
"expérience".
Mais sont-elles si
différentes ces expériences ?
Et est-ce que la
transformation est bonne ?
J'ai lu que le taux de
transformation des enseignes de bricolage est de 50% ! Cela veut dire que la
moitié des clients repartent sans rien acheter.
La moitié ! Qu'en est-il de ces centres
qui par ailleurs sont pleins, même si en effet, c'est l'affluence due à la
nouveauté ?
Le paradigme de te faire
venir, attendre dans ta voiture pendant une heure avant de rentrer dans le
parking, monter les escaliers, circuler dans la passerelle extérieure de
Beaugrenelle pour passer de Magnetic (!) à Panoramic (!!) qui te fait
furieusement ressembler à un zombie dans le film d'Apple 1984, faire la queue une
heure pour déjeuner, gifler tes enfants à intervalles réguliers, transpirer
comme un pizzaiolo, te faire insulter (Mais attention madame enfin !) pour
acheter une paire de chaussettes chez Uniqlo et rentrer regarder Groland en
buvant un single malt pour se remettre.
Je ne vois rien de réellement
innovant. Il y a plus de Sephora que par le passé et ça c'est réellement une
bonne nouvelle mais à part ça.
Je pense en réalité - mais vraiment - que ce
qui fait le succès d'un centre commercial, c'est quand les gens qui y vont ont
l'impression de ressembler aux autres gens qui y vont et en sont contents.
C'est exister au sens de Berkeley c'est à dire "percevoir et être perçu".
C'est quand le centre permet aux gens de construire leur identité.
Quand les femmes sont contentes de
se maquiller avant d'y aller et les hommes sont contents de ne rien faire du
tout mais de regarder les femmes qui se sont maquillées.
Et pour cela, d'ailleurs rien
ne vaut un grand magasin.
Je viens de lire deux petits livres et je suis bien embêté.
Le premier, c'est Delivering
Happiness (en français aux éditions Leduc, L'entreprise du
bonheur).
Il est l'oeuvre d'un Américain d'origine taiwanaise. Tony Hsieh
(prononcer "toniché").
Diplômé d'Harvard à 22 ans. En 1996, il crée une start up, revendue à
Microsoft deux ans plus tard pour 265 millions de $.
Il a 23 ans. Il glande un peu. Joue au poker à Vegas
(il lit des livres sur le poker pour gagner au poker et gagne au poker).
Il crée un fonds d'investissement. Investit puis prend en 1999 la
direction de Zappos.com, site marchand de chaussures sur internet.
En 2009, il revend Zappos à Amazon pour 1.2 milliard de $
(dont environ 20% dans sa popoche).
Sa vie, son grand œuvre, son approche du business sont tellement,
mais alors tellement loin du capitalisme à la française. Là on y voit la
quintessence d'une vision communautariste, positiviste, utilitariste,
volontariste
dont les Américains ont le secret.
Hsieh, c'est un enfant né coiffé, confiant en lui-même et
dur à la tâche.
Zappos.com, c'est une entreprise - précurseur de la vente de
chaussures en ligne (une fiction grammaticale il y a encore quelques années) - construite
autour d'un noyau : la qualité du service client. Sans doute le meilleur service client au monde.
C'est
l'exemple de ce à quoi on peut aboutir quand on crée une entreprise
à partir d'une page blanche et qu'on n'a pas à gérer des décennies d'histoire, de
rancœurs
syndicales, de CEO mercenaires, d'actionnaires myopes et de salariés
désabusés.
C'est une culture d'entreprise aussi géniale d'intelligence que totalitaire, aussi
performante qu'infantilisante.
Un exemple par exemple, comme dirait Jacques Klein :
A l'issue de la première semaine de training des nouveaux
employés, on leur propose à chacun 2000$ s'ils démissionnent. En plus de leur
salaire prorata temporis. Comme ça, on est sûr que ceux qui restent le font
parce qu'ils croient dans la démarche de Zappos. Mélenchon entendrait ça, il avalerait Politique du Rebelle en format in-12.
Autre exemple par exemple, c'est que les téléconseillers ont carte blanche
pour offrir le meilleur service client. Pas de durée maximum de conversation,
pas de vente forcée, pas de guide d'entretien. Autonomie totale.
Hsieh raconte que le plus long échange téléphonique entre un
client et un téléconseiller a duré près de 6 heures (sur Wikipedia, ils disent 8
heures).
Bref.
La qualité du contact client d'aujourd'hui construit les
ventes de demain. Chez Zappos, on n'hésite pas à te répercuter sur un site
concurrent s'ils sont en rupture d'un produit…
Deuxième livre : Amazonie.
Infiltré dans le meilleur des mondes.
Petit récit de Jean-Baptiste Malet, 26 ans, qui s'est fait
engager dans une plateforme logistique d'Amazon à Montélimar pendant plusieurs
mois pour comprendre et raconter ce qu'il est impossible de savoir autrement,
étant donné le culte absolu du secret et la pression qu'Amazon exerce sur ses
salariés pour empêcher toute fuite, si minime soit-elle sur ce qu'il y a à
l'intérieur de la boîboîte.
Rappelons-nous que Hsieh a vendu (par échange d'action)
Zappos.com à Amazon.com. Donc il partage des trucs avec Bezos, en dehors de lui
préparer des burgers sur le BBQ de son jardin.
Le récit de Malet est édifiant sur l'obsession productiviste
et la pingrerie mesquine d'Amazon, le décalage ahurissant entre l'optimisme
volontariste d'un Hsieh et le désespoir pessimiste du salariat précaire de
notre pays.
N'étant allé vérifier ni à Las Vegas ni à Montélimar, je ne
peux que juger sur la base de leurs propos. Donc toutes choses égales par
ailleurs.
Deux anecdotes sur "l'Amazonie" de JB. Malet.
Quand on rentre dans l'entrepôt, on peut lire marqué au
dessus de sa tête un très beau "Work hard. Have fun. Make history" en
anglais dans le texte.
Qui génère un mélange d'indifférence et d'incrédulité chez les
intérimaires qui se pressent pour prendre leur poste à 21h30.
Malet a choisi d'être picker
pour son enquête.
Le picker, c'est celui qui va chercher les produits dans son
chariot pour les amener au packer qui
lui les emballe.
Pour picker, le picker parcourt plus de vingt kilomètres
chaque jour (ou nuit). Son parcours est réglé par l'ordinateur qui l'oriente vers
les produits les plus proches, comme dans une sorte de chasse aux œufs de
Pâques sans fin, où sa productivité est mesurée en temps réel.
JB Malet n'y va pas de main morte sur la méchanceté, le
sadisme, l'ingratitude, l'hypocrisie, la cupidité de l'entreprise Amazon et de
son système qui emprunte plus à Taylor qu'à Toyota.
Même si Amazon est loin d'être la seule entreprise en France
ou dans le monde à pratiquer flicage, brimades et rentabilité obsessionnelle,
le livre de M. Malet nous met en lumière le décalage entre la légèreté de l'acte d'achat et la réalité humaine derrière.
Alors qu'est-ce que je fais ? J'arrête Amazon ?
Je leur achète un... paquet de trucs à l'heure actuelle. Et depuis quinze ans, je leur ai filé un max de blé.
J'ai commencé sur le .com en 1998. Puis le .co.uk parce que
la livraison était plus rapide. En 2000, je suis passé au .fr.
"J'ai tout vu, tout fait, tout usé" chez Amazon pour
paraphraser un de ses fournisseurs. Le One-Click™, le compte Premium, le Market
Place. J'ai acheté, mais alors, de tout. J'ai vendu aussi.
Avant je me faisais livrer au bureau pour avoir l'air
tendance. Quand je rentrais de déjeuner, je trouvais ma commande sur mon
bureau. Sous les yeux de mes collègues EBAHIS. Et moi J'EXULTAIS.
Après, je me suis fait livrer chez moi, pour avoir le
plaisir de trouver ce petit paquet marron au pied de ma porte en rentrant.
J'ai constaté, sans aucun regret ni nostalgie ni culpabilité, que la
multiplication des petits paquets marron a coïncidé avec une raréfaction voire
quasi-disparition des petits sacs marron de la FNAC.
Mais depuis ce "voyage en Amazonie" (livre très à charge et peut
être pas totalement objectif. Encore une fois, je n'en sais rien), je suis en revanche conscient d'une chose : c'est
qu'avant que le gars d'UPS sonne à ma porte avec mon paquet contenant des
cartouches d'imprimante, une monographie de Jean Widmer ou une centrale à
vapeur, et pour assurer les délais de livraison proprement hallucinants
d'Amazon, ce n'est pas l'entreprise du bonheur derrière.
Ce qui me frappe surtout, c'est à quel point tout est
magiquement et génialement pensé pour rendre l'acte d'achat aussi facile que
possible et occulter toute la sueur du back office.
C'est cet écran de fumée soigneusement entretenu qui, quand il se dissipe un peu commence à piquer les yeux et devient désagréable. N'en déplaise au très fat Montebourg.
Alors qu'est-ce que je fais ?
Je supprime mon compte Premium et le One-Click™ ?
J'imprime les pages de livres que je veux acheter
et je descends les porter à la librairie d'en bas (en espérant qu'ils ne se
fassent pas livrer par Amazon eux) ?
Et puis quoi d'autre ?
Le mathématicien Von Neumann expliquait à Richard Feynman pendant leurs promenades à Los Alamos qu'on n'a pas à se sentir responsable du monde dans lequel nous vivons. Cela dit, il travaillait sur la bombe atomique alors ceci explique peut être cela.
Mais moi dans tout ça ?
Je suis bien emmerdé.
Et qu'est-ce que je fais le jour de la sortie de l'iPhone 5S ? Je reste avec mon 5 ? Mais c'est pas possible !
Alors qu'est-ce que je fais ?
Comme disait Etienne Dorsay à Daniel dans Un éléphant ça trompe énormément quand on lui demande s'il veut une martingale :
Pour ceux qui ne prennent pas tous leurs repas à la maison et qui s'intéressent aux marques, voici une information intéressante.
Alain Ducasse, qui est à la cuisine ce que Microsoft Excel est aux tableaux croisés dynamiques, c'est à dire une sorte d'aboutissement, vient de lancer un nouveau label appelé "Restaurant de Qualité" avec ses compères Paul Bocuse (qui a le même âge que Margaret Thatcher), Anne-Sophie Pic ("pique bien avec ta fourchette" lui aurait dit Lacan pour expliquer sa vocation) et Thierry Marx (là je ne commente pas).
Je résumé brièvement la démarche d'AD et ses amis :
1. Surgelés + en provenance de chez METRO : ras le chinois (l'ustensile).
2. Les facéties de TVA : ras le faitout.
3. Les débats sans fin(s) de la ministre Sylvia Pinel (qui n'est pas allée se faire psychanalyser chez Lacan, elle) pour savoir si oui ou non il serait opportun de lancer un label "Maître Restaurateur", contre l'avis de l'UMIH (Union des Métiers et des Industries de l'Hôtellerie) qui préfèrerait "Artisan Restaurateur" : ras le bouquet garni.
Alors pendant qu'on conjecture et qu'on décongèle, Ducasse agit'prop' et prend tout le monde de vitesse en créant une belle plaque émaillée que les adhérents cooptés dudit label "Restaurant de qualité" pourront apposer à côté de leur porte.
Et enlever le très laid autocollant Lafourchette ou Tripadvisor qui ne veut pas dire grand chose.
L'initiative est censée se limiter à 400 restaurants uniquement. Ce qui fait éructer encore plus les lobbyistes de la cuisine en France qui se retrouvent dépositionnés ipso facto : cela veut dire que les 149
600 établissements restant sont des restaurants "pas de qualité".
Non. Rien n'a changé depuis l'Aile ou la Cuisse. Il y a presque 40 ans...
Ce collège censitaire de 400 établissements me fait furieusement penser à Steve Jobs expliquant en 2007 au lancement de l'iPhone qu'il ne visait que seulement 1% du marché du téléphone mobile. On a vu la suite.
Bien sûr que cela fait un label de plus. Mais il est plutôt malin dans le choix du nom. Et l'idée de la plaque émaillée n'est pas stupide du tout et redoutablement évocatrice.
Et si cela permet de remettre de l'ordre dans ce capharnaum qu'est la restauration.
Avec "Restaurant de Qualité", l'existence précède les sens. Si si.
Bonne journée et bon appétit comme dirait l'autre grand chef, celui au regard si perçant.
C'était en 1993. Juste avant l'été. Les deux piliers structurants de l'enseigne et de la communication Auchan, le prix et le choix, avaient donné lieu à la création de deux petits films très drôles réalisés par Etienne Chatiliez, le frère de Philippe.
C'était de la pub. De la bonne pub. Mais de la pub.
Vingt ans plus tard, qu'est-ce qui a changé ?
Chatiliez a laissé la place à un épigone de Depardon. Nous avons quitté les studios d'Aubervilliers et le pavillon Puebla pour Noyelles-Godault, un des premiers hypermarchés d'Auchan, situé près d'Hénin-Beaumont, petite ville du Pas-de-Calais devenue célèbre pour des raisons indépendantes de sa volonté.
Plus sérieusement, on peut trouver ça sexiste (et y'en a un peu en effet / Lucille Merra @lucileeureka. Merci pour le lien) mais pour moi, ce lipdub appelle plusieurs commentaires.
1. A moins d'être le Seigneur Vador, on voit bien qu'il est désormais très difficile de gérer une image homogène à l'heure du web social, en particulier dans une organisation décentralisée comme une chaîne d'hypermarchés.
2. Peut-on communiquer autre chose que du rationnel et du prix pour une grande enseigne quand ce genre de vidéos remonte quatre à quatre les escaliers du moteur de recherche de YouTube / Google ?
Dit autrement, est-ce qu'on peut construire de l'imaginaire encore en publicité en 2012 ?
3. Et finalement, est-ce qu'elle n'est pas au contraire formidable cette vidéo en montrant que derrière un magasin en libre-service où personne ne nous adresse la parole avant la caissière SBAMeuse, il y a en réalité une foultitude de gens ? Sympathiques ou pas sympathiques, en tout cas, ils sont vrais.
A l'heure où Amazon, Apple et Google sont en train de mettre en coupe réglée les bases de données des marques et créent des vrais problèmes de distortion de concurrence avec les distributeurs traditionnels comme le dit très justement Serge Papin dans les Echos du 6 décembre et pendant qu'on parle de sidérurgie TOUTE LA JOURNEE dans les médias (je compatis pour les sidérurgistes mais hiérarchisons les priorités) : pourquoi nos enseignes ne s'attelleraient pas à organiser ce genre d'initiatives dans un vrai dispositif de communication ?
C'est pas demain la veille que les pure players, les Madeleine Vionnet de l'évasion fiscale, pourront faire ça.