1999 : lancement de probablement une des meilleures campagnes qu'on ait jamais faite pour une compagnie aérienne.
Air France avec BETC (ou l'inverse) : "Faire du ciel le plus bel endroit de la terre".
Les Chemicals, Gondry, la petite mèche qui tombe quand l'avion croise celle-ci. Etc…
Personne ne descend dans la rue pour crier sa joie pour mais tout le monde est scotché.
Et tout le monde recommence à monter dans les avions d'Air France : création du hub, programme de fidélisation, moins de retards, toussa toussa la campagne = intention de prendre l'avion avec Air France avant et après la campagne catapultée dans la stratosphère.
Un carton quoi.
2014 : nouvelle campagne.
Magnifique, exubérante, innovante, décalée, "raffish" diraient les Anglais. Une écriture sublime. Des visuels saturés. On croit un peu au fake avec le visuel de l'A380 au-dessus de la pièce d'eaux des Suisses mais pour le reste, on tient un vrai renouvellement, qui positionne le voyage à la française, l'amour des gestes et des savoir-faire comme dirait la marque France, auprès des Chinois, tous "tier" confondus, les Brésiliens, les Mexicains, les Indiens, les Russes, etc.
Mais qu'est-ce qui se passe ?
Deux jours après l'ouverture de l'exposition sur le voyage à la française au Grand Palais (du vrai, du bon brand content ça), les pilotes se mettent en grève.
Bien sûr, il y a eu des grèves entre 1994 et 2014.
Bien sûr, Transavia sous droit social portugais, ce n'est pas rien.
Mais là. Un mouvement social massif vraiment massif. Pas du toc. On parle désormais de 500 millions d'euros de pertes. Soit un A380 tous pleins faits.
ça, c'est de la vraie défiance des pilotes vis à vis de leur direction.
Alors question bizarre, est-ce que finalement les pilotes se reconnaissent dans cet esthétisme bariolé et rococo ?
Est-ce qu'ils ne se reconnaissaient pas plus dans l'identité froide, glacée, épurée, Hugo Boss-ienne de la campagne "Faire du ciel" ?
Est-ce que cette grève n'est pas – aussi – l'expression d'un rejet, d'un blocage "psycho-social" des pilotes, qui sont le métier noble de la compagnie ? Qui n'ont pas envie de passer pour des meneuses de revue ou des dames de compagnie.
Bien sûr que non. Et bien sûr que un petit peu quand même aussi.
Peut-être que le miroir que leur a tendu la campagne ne leur correspond pas. Ne correspond pas à l'image que les pilotes se font d'eux-mêmes. Qui ne sont pas venus du monde du service mais souvent de l'armée de l'air.
Alors, s'il y a peut être un tout petit peu de lien entre les deux phénomènes, c'est intéressant de pointer que les campagnes de pub sont parfois plus importantes pour l'interne que pour l'externe dans les très grandes entreprises avec des milliers de salariés.
1. Etre arrivé à générer au préalable des contre-propositions des concurrents (Samsung, LG) avant même d'avoir révélé développer ni même montré sa propre montre, c'est très fort.
2. Vit-on jamais en aucun temps, en aucun pays plus magnifique explosion de moyens pour expliquer et montrer un produit ?
Je ne crois pas.
Il ne faut pas rester sur le petit film de la keynote (OK… "Le" keynote). Il faut regarder les dix minutes de démo avec en voix off Jony Ive qui déclame une sorte de mode d'emploi – manifeste de l'Apple Watch.
Dans vingt ans, je parie que cette vidéo sera montrée à Venise dans un musée de François Pinault.
La rédaction. Rôôôôôôô. Le montage ! Le montage ! La musique…
Et la douce voix de notre bon Jony qui susurre des phrases comme :
- The simple leather classic buckle references traditional watch vocabulary.
"Traditional watch vocabulary"… J'imagine les interminables discussions sur le projet devant un verre de Dalla Valle 2002 avec Angela Ahrendts dans son manoir avec vue sur Alcatraz. Oui, la maison de Jony Ive donne sur Alcatraz. Ah ben ça alors.
- We have worked closely with horological experts from around the world to help us understand the cultural and historical significance of time-keeping. And this has profoundly informed our design.
J'imagine les "horological experts", enlevés dans leurs ateliers suisses, la tête recouverte d'un sac en feutrine noire, emmenés dans un avion privé pour Cupertino où l'on les interroge sur la "cultural and historical significance of time-keeping" avant de les faire hypnotiser par un mentalist afin de tout oublier et de de les réexpédier à Schaffhausen par le même Falcon 7X.
3. C'est l'éloge de la servitude volontaire. La tyrannie des objets.
Lafontaine vivrait encore, il réécrirait le Loup et le chien version celui qui a une montre Apple et celui qui n'en veut pas. Et Guy Debord se resservirait un demi devant un tel désespoir.
4. Le produit sert-il à quelque-chose ?
Non. Et oui.
En fait la question n'est pas là. Je crois qu'on rira dans quelques années quand la V4 ou V5 de l'Apple Watch sera sortie.
Celle-ci est grosse, épaisse, pas très belle, pas étanche, avec une autonomie ridicule, inutile sans son iPhone à proximité.
Mais le "quantified self", l'hyperconnexion, l'autonomisation vis à vis du device référent qu'est le mobile à l'heure actuelle, ça va nous tomber dessus aussi sûrement que… la pomme de Newton.
C'est un changement de plateforme. De paradigme. On se trouvera ridicule d'avoir trimballé pendant des années ces téléphones mobiles dans nos poches.
Ça va prendre du temps. Ce sera la réussite d'Apple ou d'autres. Ou de plusieurs et après des débuts difficiles, mais c'est sûr qu'on y va.
Le paradoxe est d'ailleurs que la jeune génération ne porte plus de montres.
You know it's driving Apple, from the beginning. This, compulsion, to take incredibly powerful technology, and make it accessible, relevant, and, ultimately personal. We’ve designed, a range of products so personal, you don’t put them on your desk or in your pocket—you wear them, on your wrist. We conceived, designed and developed Apple Watch, as a completely singular product. You know you can’t determine a boundary, between the physical object and the software.
We’re introducing, an unparalleled level of technical innovation, combined, with a design, that connects with the wearer, at an intimate level to both - embrace individuality - and inspire desire.
The watch senses, that you’re raising your wrist, and then activates the display. You see, an organization of apps, that while new, is somehow familiar. Navigation, is fluid, and vital. Magnifying content, on a small display, is fundamentally important. So we’ve developed, a whole new interface - specific to the challenges associated, with a product this small.
The digital crown, is a remarkable input device. It fluidly zooms into apps. It enables, nimble, precise adjustment. And critically, you can use it, without obstructing the display. It’s also the home button.
Apps are designed, for light-weight interaction. Smart replies and dictation, let you respond quickly to messages. Glances, let you swipe through information efficiently. And pressing the button below the digital crown, instantly shows you friends, you can contact in just seconds. And with digital touch - we’ve developed an entirely new way, for you to connect intimately with others. You can get someone’s attention, with a gentle tap. Or you can send huh quick sketch. Or you can even share - something as personal as your own heartbeat.
These are… subtle ways to communicate, that technology, often inhibits, rather than enables.
These apps, all take advantage, of the flexible retina display. It’s been laminated to a machined and polished, single crystal of sapphire. That’s the second hardest transparent material, after diamond.
In addition to the digital crown, we’ve had to invent other input technologies designed specifically, for a product this small. So as well as sensing touch, the display also senses force —quite literally - adding a new dimension to the user interface. Tiny electrodes, around the display, recognize the difference between a tap - and a press. This provides, instant access to a whole range of contextually specific controls.
For the first time, and - with great intention, we’ve designed, not only what you see, but also what you hear and feel.
We’ve developed, a linear actuator, to provide “taptic” feedback, to complement your interactions. This “taptic engine”, combined with the audio feedback from our water-resistant speaker, creates a discreet and nuanced experienced.
At the heart of the watch, is a custom-designed chip, that integrates many subsystems into one remarkably compact module. Which is then completely encapsulated, to protect the electronics. It’s essentially, miniaturizing a entire computer system onto a single chip.
The zirconia back, has four, sapphire lenses. Infrared and visible light LEDs, along with photo sensors, detect your pulse rate. Using its gyroscope and accelerometer and the GPS and Wifi from your iPhone, the Watch provides a comprehensive picture, of your daily activity. This allows it, to establish and suggests goals. And reward fitness milestones.
The back crystal, also houses a unique charging solution that combines our MagSafe technology with inductive charging. Completely sealed, it requires no alignment or exposed contacts.
Apple Watch is, incredibly accurate. It uses, multiple technologies, keeping time to plus or minus 50 milli-seconds. We have worked closely, with horological experts, from - around the world, to help us understand, the cultural and historical significance of time-keeping. And this has profoundly informed our design.
We know, that wearing something all day, every day, becomes, as much about personal preference and self-expression as functionality. So we’ve designed a range of watch faces. You can personalize, both their appearance, and their capability.
Personalization, extends way beyond the interface. We have designed, six different straps, and a mechanism, that makes the straps easily interchangeable - with a refinement and precision that’s born of functionality.
The sport band, in a range of bold colors, is made from a tough, durable, sweat-and chemical resistant high-performance elastima.
The leather loop, comes in a soft, quilted leather, that conceals magnets for fastening and adjustment. We’ve used traditional leather, but in a new sports context that’s, designed for optimum comfort.
The supple, hand-crafted leather modern buckle, closes, with a solid metal clasp, that wraps symmetrically around the wrist.
The simple leather classic buckle, references traditional watch vocabulary. And the stainless steel link bracelet, has a slim - deployment clasp, that is contained within a 2.6 mm band.
The Milanese loop, is crafted, from a fluid, flexible, stainless-steel mesh, with a magnetic closure, that has an elegant simplicity and is infinitely adjustable.
And of course, we knew, one size wouldn’t fit everyone, so we’ve also developed a smaller watch with matching smaller straps.
From different cases and straps, we’ve actually created three distinct collections.
The first, Apple Watch, features a polished case made from a custom alloy, of stainless steel.
The sport collection has an ion-exchanged cover glass, and a anodized aluminum case, that is 60 percent stronger, than standard alloys, and yet it’s incredibly light and durable.
Apple Watch Edition, is made from 18-karat gold, that our metallurgists have developed to be up to twice as hard as standard gold.
Creating, beautiful objects, that are, as simple, and pure, as they are functional—well, that’s always been our goal at Apple. We designed Apple Watch as a whole range of products, enabling millions of unique designs. Unparalleled personalization both in appearance and capability.
I think now, we’re now at a compelling beginning. Actually designing technology, to be worn—to be truly personal.
On connaît tous l'histoire. En 2001, Marks & Spencer en difficulté financière quitte la France.
Des hordes de harpies s'arrachent les derniers bocaux de poivrons marinés dans le magasin du boulevard Haussmann.
Ensuite plus rien. Pendant dix ans.
Seule solution, faire un détour après une réunion à Londres pour aller faire des provisions à Covent Garden de Thé du Kenya Extra strong ou de beans à la sauce tomate.
Dix ans plus tard, c'est le grand retour. D'abord aux Champs Elysées avec un corner alimentaire assez petit. Et puis… et puis. So Ouest, Aéroville, Beaugrenelle, etc. Et puis des Simply Food dans les rues ou dans les grands centres de passage comme les gares RER.
Ça y est. On va pouvoir voir de quoi ils sont capables en matière de marketing les Anglais.
C'est pas compliqué : c'est quasi-parfait. Génie du packaging, de l'identité, du naming, de la rédaction, de la structuration des gammes. De "l'homogénéité dans la différence" pour plagier je ne sais plus qui.
On lit beaucoup que dans ce métier, il faut avoir le sens du détail. Mais là le détail est tellement poussé qu'on se demande ce qu'il va pouvoir être possible de faire après. C'est la fin du marketing peut être. En tout cas d'un certain marketing.
Le lait, c'est pas du lait. C'est du lait des iles Anglo-normandes…
On ne dit pas "allégé" mais Count On Us au sein de la gamme Fuller Longer.
Ce sont des gens qui investissent dans l'extrême qualité des photos, qui agrègent et hybrident avec talent le modèle alimentaire britannique et des modèles étrangers. Pas que le Chicken Korma parce que Jamie Oliver est passé par là depuis et que l'Angleterre est un désormais un endroit où l'on s'intéresse à tout ce l'étranger produit de mieux en alimentaire.
Alors, le niveau de qualité objective n'est pas toujours au rendez-vous. Je veux dire que le 2nd moment of truth est parfois un peu déceptif après le 1er en magasin. Les produits sont bons. Certains excellents. D'autres tout simplement très bof.
Ce qui me frappe, c'est que le contrat est clair. De la qualité, simply priced mais bien chère quand même, des DLC courte, un ton de voix très reconnaissable et toujours sur le principe de l'intelligence.
Ce modèle n'est pas universel. On ne va pas se convertir au modèle alimentaire britannique au quotidien. Ce ne sera jamais "une niche qui arrose tout le monde" comme avait dit quelqu'un il y a longtemps.
En tout cas, il permet de réévaluer nos standards. Comme si Tesco ou Waitrose débarquaient dans nos centre-villes.
Oui, je crois qu'au delà du niveau de prix – élevé – Marks & Spencer valorise l'image que les clients se font d'eux mêmes.
Parce qu'on n'achète pas des produits ou des services dans la vie. On achète une meilleure version de soi-même.
Des centres commerciaux, il y
en avait déjà en France, mais le nombre d'ouvertures récentes tend à faire penser
qu'on en manquait.
Etant allé visiter les trois
derniers dans et autour de Paris, je me pose cette question à mille milliards
d'euros : qu'est-ce qui fait que ça marche ou pas ?
Le premier élément de réponse
est que ce ne sont certainement pas les campagnes de pub : toutes plus
tragiques les unes que les autres, du "shopping 5 étoiles" au
très GérarddeVilliersien dos dénudé de cette jeune femme, habitante du Front de
Seine, tour Perspective 2, appartement 2304, qui nous fait frissonner derrière
le cul de bus.
Non.
Le concept ?
Quel concept ? C'est quoi le
"concept" ?
Un mélange d'emplacement, de
taille, de fonctionnalités, de sélection d'enseignes dont celles que l'on
pourrait appeler les "anchors" (celles qui aspirent le chaland) comme
un hyper (Leclerc à So Ouest, Auchan à Aéroville, et un… Monoprix à Beaugrenelle).
Les marques exclusives ?
Mais c'est impossible de tout
avoir. Il faut choisir.
A moi Hema, à toi Guerlain.
A moi M&S, à toi aussi
M&S. Et à moi aussi !
A toi SuperDry (super nom), à
moi Hollister.
A toi Bose, à moi Bose aussi.
Bon.
Mais je ne vais pas aller
là-bas pour une seule enseigne.
Les services annexes ?
Un très beau food court /
mall chez Aéroville (génial nom Aéroville. Logo pas terrible) mais où il faut faire
une heure de queue pour manger des vongole
chez Fratellini (celle du cirque ?!!) alors qu'il n'y a personne chez Prêt
à Manger. Mais non.
Un endroit qui a
"l'audace de réinventer le goût" chez So Ouest avec Dalloyau ?
Un Noura et le grand retour
du Bermuda Onion, un marqueur mémoriel du XVème arrondissement, un amour des
gestes et des savoir-faire chez Beaugrenelle ?
Alors quoi ?
D'abord constatons que
l'inventivité semble être surtout mise au service de la sélection des
enseignes. Aller trouver et signer ce qui est tendance, ni trop, ni trop peu.
Pas trop niche. Pas trop mass non plus.
Que la fonctionnalité, les
circulations, le repérage, cela reste encore quelque chose de bizarrement pas
au top.
Pas de wifi. Enfin je veux
dire que je n'ai pas réussi à me connecter en wifi avec mon téléphone. Jamais.
Chez aucun des trois.
Pas de 3G non plus.
On peut passer des appels
cela dit. C'est pas comme au Salon du Bourget.
Pas de parking 2 roues devant
Beaugrenelle et des hordes de contractuelles névrosées alignant les scooters
comme à la bataille d'Eylau.
On se frotte les yeux. On se
gare sur le parvis devant les jonquilles où ça ne gêne personne et on se fait
aligner. Mais c'est du suicide commercial. Enfin.
Je n'ai pas trouvé les places
2 roues à Aéroville. En revanche j'ai trouvé le sol peint à la laque
glycérophtalique qui te fera remplacer ton rétroviseur si tes pneus sont
mouillés du dehors.
On semble rester sur ce
paradigme du concept, de la sélection, du cocktail, avec une dose d'identité
qui se tient à la bonne distance de celle des enseignes.
On tente le geste
architectural mais sans aller trop loin. Une trémie immense à Beaugrenelle qui
permet de ne pas voir les magasins en dessous, qu'on ne pourra d'ailleurs pas atteindre car
on ignore où vous dirigent les escalators.
Un labyrinthe chez So Ouest.
Un circuit en forme de
je-ne-sais-pas chez Aéroville avec du personnel en tenue de personnel de vol
façon Catch me if you can.
Oui, on étire sur le concept,
comme de la guimauve.
On n'invente rien de
réellement nouveau.
Avec le paradigme que dans
"centre commercial", il y a centre et il y a commercial.
On pense transaction et
"expérience".
Mais sont-elles si
différentes ces expériences ?
Et est-ce que la
transformation est bonne ?
J'ai lu que le taux de
transformation des enseignes de bricolage est de 50% ! Cela veut dire que la
moitié des clients repartent sans rien acheter.
La moitié ! Qu'en est-il de ces centres
qui par ailleurs sont pleins, même si en effet, c'est l'affluence due à la
nouveauté ?
Le paradigme de te faire
venir, attendre dans ta voiture pendant une heure avant de rentrer dans le
parking, monter les escaliers, circuler dans la passerelle extérieure de
Beaugrenelle pour passer de Magnetic (!) à Panoramic (!!) qui te fait
furieusement ressembler à un zombie dans le film d'Apple 1984, faire la queue une
heure pour déjeuner, gifler tes enfants à intervalles réguliers, transpirer
comme un pizzaiolo, te faire insulter (Mais attention madame enfin !) pour
acheter une paire de chaussettes chez Uniqlo et rentrer regarder Groland en
buvant un single malt pour se remettre.
Je ne vois rien de réellement
innovant. Il y a plus de Sephora que par le passé et ça c'est réellement une
bonne nouvelle mais à part ça.
Je pense en réalité - mais vraiment - que ce
qui fait le succès d'un centre commercial, c'est quand les gens qui y vont ont
l'impression de ressembler aux autres gens qui y vont et en sont contents.
C'est exister au sens de Berkeley c'est à dire "percevoir et être perçu".
C'est quand le centre permet aux gens de construire leur identité.
Quand les femmes sont contentes de
se maquiller avant d'y aller et les hommes sont contents de ne rien faire du
tout mais de regarder les femmes qui se sont maquillées.
Et pour cela, d'ailleurs rien
ne vaut un grand magasin.
Le rapport sur la "Marque France" est très intéressant. Et j'y reviendrais dans quelques jours en croisant l'analyse avec le livre de Guillaume Duval "Made in Germany".
Dans le rapport sur la marque France, en synthèse, on nous explique que la France, c'est ça :
C'est pas faux et c'est pas con, même si c'est un peu faux et un peu con quand même. Mais j'y reviendrais.
Mais voilà que sort le nouveau permis de conduire devant remplacer le trois volets couleur papier toilette qu'on se trimbale depuis des décennies.
Alors ? Une occasion de faire un peu preuve d'amour des gestes et des savoir-faire, de la capacité à penser et à initier, voire de l'art de la surprise ?
Aucune surprise dans ce design. Il est épouvantable, illisible, stupide, raté et laid.
Qu'on ne vienne pas me dire que c'est pour des questions de sécurisation du document.
Celui qui me dit ça, je lui fais bouffer une monographie de Jean Widmer.
Nos dirigeants n'ont pas le sens du design. Ils ont peut être un portrait de Colbert accroché dans leur bureau, mais le sens du beau, certainement pas.
Ce n'est pas le GALFA Club. C'est le GAFA Club. Le club des quatre poids lourds du numérique qui de plus en plus nous vendent les mêmes choses (des contenus), nous achètent la même chose (notre attention) et voudraient nous incorporer chacun dans leur écosystème pour en retirer les loyers.
Cette bataille d'attention et de contenu se joue aussi sur l'identité de marque. Parce que pour tout consommateur, une marque naît d'abord de la différenciation.
Le précurseur historique et leader toutes catégories en matière d'identité visuelle est Apple. Avec la rémanence de l'obsessionnel Steve Jobs, le skeuomorphique Scott Forstall et le très secret Hiroki Asai, responsable de l'identité visuelle chez Apple, à la tête d'une équipe interne de 200 personnes.
Historiquement, Apple a toujours ancré son design sur un référent analogique, celui du monde réel : des engrenages pour désigner les réglages, un clap pour évoquer les vidéos, voire des étagères en bois pour parler de bibliothèque numérique.
La grande rupture qui semble se dessiner est l'abandon du skueuomorphique pour une identité "very flat" à ce qui se murmure et que nous pourrons vérifier lundi 10 juin prochain à 19h en suivant la conférence d'Apple au WWDC.
Scott Forstall viré d'Apple, c'est Jony Ive qui a repris le design UI
et qui renvoit à Alcatraz le design skueumorphique. Pour paraphraser
Philips, c'est "flat and simplicity".
Le monde était plat. Le design le devient.
Très fonctionnelle voire uniquement fonctionnelle au départ, l'identité visuelle de Google ne se résume pas à ses doodle animés, destinés à fêter l'invention du synthé par Robert Moog ou le 540ème anniversaire de Copernic.
Le système de marque est très malin avec une gestion du nom de marque bien tempérée : de Google Wallet à Gmail, en passant par YouTube pour des raisons historiques.
On découvre grâce aux créateurs eux-mêmes, les principes de l'identité graphique de Google (le site complet est là).
C'est très très très intéressant.
D'abord parce que l'extrême rigueur des principes montre qu'il n'y a pas qu'Apple à être scrupuleux sur l'expression de son identité. Voire maniaco-obsessionnel.
Ensuite parce que cela converge pour indiquer l'arrivée du plat et la fin des coquetteries 3D en matière de logo et de design depuis des années.
Voici les grands principes de l'identité graphique de Google :
Simplicité.
Tu as envie d'essayer de faire quelque chose de compliqué ? Eh bien essaye de le faire le plus simple possible. Tu vas voir. C'est mieux.
Approche géométrique systématique des formes.
De face et pas de relief. Plat quoi.
Des ombres nettes et pas floutées.
Des combinaisons de couleurs définies et une attention au pixel près. "Mind the pixels" : même petits, ils sont précis.
Google commence à créer son monde, naïf (en apparence), sympathique (enfantin donc infantilisant), coloré, ludique.
Et il l'a formalisé. Il est bien spécifique. Différent. Déseffrayant.
En troisième position, voici Facebook. Qui est bien "enclavé", comme dirait Mercedes Erra, dans son monde bleuté, parsemé de quelques icônes et surtout jonché de contributions de qualité graphique inégales sur les pages des marques ou des membres.
Le monde Facebook est assez plat, sans jeu de mots. Assez terne.
Bon dernier, avec une réelle absence de goût et d'intérêt pour le sujet : Amazon.
Pour le moment, Amazon a une identité de logisticien. Ce qu'ils sont. Mais il serait logique qu'ils soient en train de plancher sur leur design pour posséder enfin une vraie belle identité.
D'ailleurs, ils en ont bien besoin. Ne serait-ce qu'à cause de leur système d'exploitation Silk.
Et puis j'en oublierais presque un. Qui ne boxe pas dans la même catégorie mais qui a construit depuis quelque temps une iconographie de marque très aboutie, car il est désormais dans le grand jeu de la relation-participation avec ses clients-utilisateurs : c'est Nike+.
Voilà l'enjeu. Mettre de l'identité, de la différenciation et créer de l'empathie dans un monde virtuel où rien n'est tangible.
Pour ceux qui ne prennent pas tous leurs repas à la maison et qui s'intéressent aux marques, voici une information intéressante.
Alain Ducasse, qui est à la cuisine ce que Microsoft Excel est aux tableaux croisés dynamiques, c'est à dire une sorte d'aboutissement, vient de lancer un nouveau label appelé "Restaurant de Qualité" avec ses compères Paul Bocuse (qui a le même âge que Margaret Thatcher), Anne-Sophie Pic ("pique bien avec ta fourchette" lui aurait dit Lacan pour expliquer sa vocation) et Thierry Marx (là je ne commente pas).
Je résumé brièvement la démarche d'AD et ses amis :
1. Surgelés + en provenance de chez METRO : ras le chinois (l'ustensile).
2. Les facéties de TVA : ras le faitout.
3. Les débats sans fin(s) de la ministre Sylvia Pinel (qui n'est pas allée se faire psychanalyser chez Lacan, elle) pour savoir si oui ou non il serait opportun de lancer un label "Maître Restaurateur", contre l'avis de l'UMIH (Union des Métiers et des Industries de l'Hôtellerie) qui préfèrerait "Artisan Restaurateur" : ras le bouquet garni.
Alors pendant qu'on conjecture et qu'on décongèle, Ducasse agit'prop' et prend tout le monde de vitesse en créant une belle plaque émaillée que les adhérents cooptés dudit label "Restaurant de qualité" pourront apposer à côté de leur porte.
Et enlever le très laid autocollant Lafourchette ou Tripadvisor qui ne veut pas dire grand chose.
L'initiative est censée se limiter à 400 restaurants uniquement. Ce qui fait éructer encore plus les lobbyistes de la cuisine en France qui se retrouvent dépositionnés ipso facto : cela veut dire que les 149
600 établissements restant sont des restaurants "pas de qualité".
Non. Rien n'a changé depuis l'Aile ou la Cuisse. Il y a presque 40 ans...
Ce collège censitaire de 400 établissements me fait furieusement penser à Steve Jobs expliquant en 2007 au lancement de l'iPhone qu'il ne visait que seulement 1% du marché du téléphone mobile. On a vu la suite.
Bien sûr que cela fait un label de plus. Mais il est plutôt malin dans le choix du nom. Et l'idée de la plaque émaillée n'est pas stupide du tout et redoutablement évocatrice.
Et si cela permet de remettre de l'ordre dans ce capharnaum qu'est la restauration.
Avec "Restaurant de Qualité", l'existence précède les sens. Si si.
Bonne journée et bon appétit comme dirait l'autre grand chef, celui au regard si perçant.
Proudhon disait que Marx était le ténia du socialisme.
Je vous présente les tænias d'Apple.
Le tout dernier apparu, c'est Google et son nouvel ordinateur portable, le "Pixel".
ça rappelle curieusement quelque chose. Mais quoi ?
Avant, il y avait eu la quintessence du cynisme avec les pubs Free. Totalement ahurissant quand on y pense.
Ah oui, j'oubliais Amazon et son système d'exploitation Silk (super nom by the way).
Maintenant, on enlève la forme et on garde le fond.
Voici Jony Ive qui est amené à donner son avis sur un concours de design fait par des enfants pour Blue Peter sur la BBC.
Il s'agit de faire une lunchbox qui soit également plein d'autres trucs. Plein hein. Pas pleine.
Késkikidit Jony ?
Il dit ça :
Déjà, on ne commençerait pas par dire "box" dans le brief parce que (et il fait le geste de quelque chose qui t'appuie sur les deux côtés de la tête) déjà ça te donne des idées qui t'étroitisent le neo-cortex.
Voici la nouvelle identité visuelle d'American Airlines.
Peut être que le directeur artistique a beaucoup (trop) lu Jerry Della Femina (je passe sur la puissance évocatrice du nom du mec. "Bonsoir, je m'appelle Jerry Della Femina...") et adore Mad Men.
Ah, mais on m'informe en réalité qu'il ne s'agit pas de la réelle identité d'AA mais d'un projet d'un designer chypriote (sic).
Voici la nouvelle réelle identité d'AA.
Sans avoir lu tout Roland Barthes, on est à même de discerner que dans "American Airlines" il y a le mot "American". Et cela semble leur avoir donné des idées.
C'est marrant quand même. Dès que cela va mal chez les Américains, ils se mettent à parler des pères fondateurs et de Lincoln et reviennent aux fondamentaux de ce qui constitue leur nation.
Pour ceux qui s'intéressent à l'aviation commerciale et son évolution récente, il faut lire Highest Duty, le livre du capitaine Sullenberger, celui qui a posé son avion sur l'Hudson un froid matin d'hier 2009 tous moteurs éteints rapport au fait qu'ils étaient remplis d'oies sauvages modèle Michel Delpech.
Une épée quoi.
La vidéo reconstituée en 3D pour ceux que ça intéresse, avec les voix réelles La Guardia - Chesley S.