Petit retour sur l'annonce des offres FreeMobile de ce matin.
Ce qui me frappe n'est pas le panurgisme absolu de la presse sur le "buzz" + le "buzz" + "l'orchestration du buzz" + un buzz "orchestré de main de maître" ou sa variante "savamment".
Ce ne sont pas non plus les tarifs qui ressemblent à ce qui... avait été promis. Même s'il y a énormément de choses bluffantes (et des non-dits aussi comme par exemple sur le débit data mobile).
Ce qui me frappe c'est d'abord la violence "anti association de malfaiteurs en place" de Xavier Niel, brochures publicitaires en main et sa dénonciation explicite des concurrents taxés d'oligopole / cartel / monopole. "Mon chouchou c'est SFR" dit-il tenant leur catalogue ! Jamais je n'ai vu quelqu'un taper aussi fort sur des concurrents, aussi clairement, à part peut être M.E. Leclerc. Mais lui (M.E.) on dirait Benoît XVI à côté de Xavier Niel.
L'intelligence du mouvement qu'il est en train de créer, elle se situe bien au delà de la simple dimension arithmétique et pécuniaire des tarifs. Elle est de nature morale.
On ne va pas aller chez Free (si ça marche) uniquement pour les tarifs mais également pour des raisons morales. Cela va être extrêmement dur à rattraper pour les trois "sortants" (comme dirait Pierre Poujade) en termes de lien avec leurs clients. Les trois opérateurs que sont SFR, Orange et Bouygues ont un déficit d'attachement énorme. Comme la grande distribution. D'ailleurs, c'est logique, comme eux, ils ne parlent que de prix, que de prix, que de prix.
M'a frappé aussi l'iintelligence de X. Niel à dépositionner Bouygues de sa posture d'allié du conso (tarifs + service client au top) avec sa stigmatisation de la déclaration de Martin Bouygues sur les romanichels. Et hop que je te remets derechef dans le clan de ceux qui mangent de la brioche.
Le forfait à 2 euros (sur lequel Niel affirme qu'il "marge" d'ailleurs !) est exemplaire de cette démarche. Son "One more thing" façon Steve Jobs (il y en a eu au moins trois d'ailleurs ce matin de "One more thing"), c'est un appel à la haine (toutes choses égales par ailleurs hein, on n'est pas en Syrie) contre le cynisme et le "greed" des concurrents en place.
Il n'a pas rendu lisible que la structure tarifaire du marché avec son 19,99 Xavier Niel. Il a aussi mis en lumière le modèle de rentabilité des opérateurs actuels (enfin jusqu'à hier) qui est de gagner de l'argent sur ce qui est adjacent à ce qu'on pense leur acheter.
C'est là où, encore une fois au delà du psittacisme des commentateurs sur le buzz le buzz le buzz (mais bordel, allez courir 5 bornes à chaque fois que vous aurez envie de dire "buzz", vous allez gagner vingt ans d'espérance de vie les gars), la démarche de Niel est super intelligente. C'est une démarche de marketing + communication appuyée sur un principe moral qu'il construit.
Sinon j'ai bien aimé le balancement d'un côté anti-Stéphane Richard (dont la "mamie du Cantal" sera sa "pêche aux moules" à lui) vs "Merci Stéphane Richard pour avoir soldé le contentieux de l'époque Lombard". D'ailleurs dans la petite vidéo introductive très drôle en ouverture de présentation, il n'en y a eu que "pour" Vivendi & Bouygues et jamais France Telecom.
Je serais extrêmement curieux de connaître la contribution de son agence de publicité à la conception et déploiement de ce lancement. Il se dessine là clairement la figure du patron qui connaît la communication mieux que les agences (cf. Leclerc aussi), par opposition à tous ceux qui sont largués et achètent encore des concepts de communication façon années 80. Heu "L'esprit d'équipe" par exemple. Ou "Changeons de vie, changeons l'automobile" ?
Et puis, il reste cette absence totale d'inhibition voire de scrupules à pomper les codes d'Apple. Vergogna comme on dit en Italie. Mais sans l'aisance de feu Steve Jobs. Cependant, là où Steve Jobs était métal, Xavier Niel compense dans le pathos.
Et puis il aime bien Claude Zidi visiblement. Alors...
Pour finir, est-ce qu'il en fait trop Xavier Niel ? Je ne crois pas. Ce n'était ni trop, ni con.