Ce n'est pas le GALFA Club. C'est le GAFA Club. Le club des quatre poids lourds du numérique qui de plus en plus nous vendent les mêmes choses (des contenus), nous achètent la même chose (notre attention) et voudraient nous incorporer chacun dans leur écosystème pour en retirer les loyers.
Cette bataille d'attention et de contenu se joue aussi sur l'identité de marque. Parce que pour tout consommateur, une marque naît d'abord de la différenciation.
Le précurseur historique et leader toutes catégories en matière d'identité visuelle est Apple. Avec la rémanence de l'obsessionnel Steve Jobs, le skeuomorphique Scott Forstall et le très secret Hiroki Asai, responsable de l'identité visuelle chez Apple, à la tête d'une équipe interne de 200 personnes.
Historiquement, Apple a toujours ancré son design sur un référent analogique, celui du monde réel : des engrenages pour désigner les réglages, un clap pour évoquer les vidéos, voire des étagères en bois pour parler de bibliothèque numérique.
La grande rupture qui semble se dessiner est l'abandon du skueuomorphique pour une identité "very flat" à ce qui se murmure et que nous pourrons vérifier lundi 10 juin prochain à 19h en suivant la conférence d'Apple au WWDC.
Scott Forstall viré d'Apple, c'est Jony Ive qui a repris le design UI et qui renvoit à Alcatraz le design skueumorphique. Pour paraphraser Philips, c'est "flat and simplicity".
Le monde était plat. Le design le devient.
Très fonctionnelle voire uniquement fonctionnelle au départ, l'identité visuelle de Google ne se résume pas à ses doodle animés, destinés à fêter l'invention du synthé par Robert Moog ou le 540ème anniversaire de Copernic.
Le système de marque est très malin avec une gestion du nom de marque bien tempérée : de Google Wallet à Gmail, en passant par YouTube pour des raisons historiques.
On découvre grâce aux créateurs eux-mêmes, les principes de l'identité graphique de Google (le site complet est là).
C'est très très très intéressant.
D'abord parce que l'extrême rigueur des principes montre qu'il n'y a pas qu'Apple à être scrupuleux sur l'expression de son identité. Voire maniaco-obsessionnel.
Ensuite parce que cela converge pour indiquer l'arrivée du plat et la fin des coquetteries 3D en matière de logo et de design depuis des années.
Voici les grands principes de l'identité graphique de Google :
Simplicité.
Tu as envie d'essayer de faire quelque chose de compliqué ? Eh bien essaye de le faire le plus simple possible. Tu vas voir. C'est mieux.
Approche géométrique systématique des formes.
De face et pas de relief. Plat quoi.
Des ombres nettes et pas floutées.
Des combinaisons de couleurs définies et une attention au pixel près. "Mind the pixels" : même petits, ils sont précis.
Google commence à créer son monde, naïf (en apparence), sympathique (enfantin donc infantilisant), coloré, ludique.
Et il l'a formalisé. Il est bien spécifique. Différent. Déseffrayant.
En troisième position, voici Facebook. Qui est bien "enclavé", comme dirait Mercedes Erra, dans son monde bleuté, parsemé de quelques icônes et surtout jonché de contributions de qualité graphique inégales sur les pages des marques ou des membres.
Le monde Facebook est assez plat, sans jeu de mots. Assez terne.
Bon dernier, avec une réelle absence de goût et d'intérêt pour le sujet : Amazon.
Pour le moment, Amazon a une identité de logisticien. Ce qu'ils sont. Mais il serait logique qu'ils soient en train de plancher sur leur design pour posséder enfin une vraie belle identité.
D'ailleurs, ils en ont bien besoin. Ne serait-ce qu'à cause de leur système d'exploitation Silk.
Et puis j'en oublierais presque un. Qui ne boxe pas dans la même catégorie mais qui a construit depuis quelque temps une iconographie de marque très aboutie, car il est désormais dans le grand jeu de la relation-participation avec ses clients-utilisateurs : c'est Nike+.
Voilà l'enjeu. Mettre de l'identité, de la différenciation et créer de l'empathie dans un monde virtuel où rien n'est tangible.
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